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Faire, avoir & être

06 Mar 2021

« Tu fais quoi dans la vie ? » est une question politiquement correcte et acceptable en toutes circonstances.

Dès que nous remplaçons « faire » et « avoir » par « être » nous changeons de galaxie. Nous ne jouons plus dans la même cour. Nous nous connectons à un autre niveau. Enfin… si notre interlocuteur accepte.

A la question « Tu es qui ? » la plupart répondent : « je suis médecin, formatrice, ingénieur, coiffeur ou chercheuse ». Tant de choses qu’ils FONT, mais pas ce qu’ils SONT.

Et pourtant, nous sommes des Êtres Humains, pas des Avoir Humains ou des Faire Humains.

Le verbe « être » est le plus puissant quand il est seul. Comme son ami « aimer ». « Je t’aime » est d’une puissance qui s’auto-suffit. Il ne peut être qu’amoindri quand nous lui ajoutons quelque chose comme « beaucoup ».

« Etre » sans justification aucune est doté de cette même puissance, car tous les emballages sont retirés. Ne reste plus que l’essence.

Et vous ? Qui êtes-vous ?

PS. Retrouvez les bulles en vidéo ici sur ma chaîne YouTube !

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Gundula Welti

Comments

  1. Patrick Bourg Says: mars 17, 2021 at 4:17

    Tu abordes là un sujet délicat que je vais essayer d’aborder par petites touches si, possible légères et délicates ! En fait, j’ai partiellement échouer à faire mieux ! Tu es excusé d’avance si tu ne vas pas jusqu’au bout !

    Tout d’abord il est plus facile d’être d’accord sur cet auxiliaire qu’est le verbe avoir: c’est effectivement le royaume du complexe de castration : je veux avoir ce qui me manque (désir platonicien indexé sur le manque dans sa version féminine) et j’ai peur de perdre ce que j’ai (désir platonicien indexé sur le manque dans sa version masculine)(les deux versions étant présentes que l’on soit homme ou femme). Avec l’avoir notre existence est indexé sur des objets à voir (!)(« avoir » rime avec « à voir »), le sujet que nous sommes est… asujéti à des objets qui témoignent de lui (« testis » en latin qui a donné testicule…!): le sujet est objectalisé, sujet et objet sont dans un jeu de miroir.
    N’ a t-on pas entendu dire: bien portant je suis mon corps, malade j’ai un corps.
    Quelle différence entre « je suis intelligent » et « j’ai de l’intelligence » ?: « je suis intelligent » qui exprime un état est mensonger car il est rare qu’on soit intelligent à plein temps, l’intelligence est plutôt un CDD qu’un CDI !

    Avec l’être la situation se complique car ,si l’on suit le philosophe mathématicien Frege, il y a deux êtres distincts qui pourtant sont confondus dans le même signifiant ‘être’ qui prête ainsi à confusion. Prenons les exemples de Frege:
    Si je dis « Vénus EST l’étoile du matin », j’égalise ‘Vénus’ avec ‘l’étoile du matin’, je nomme deux fois la même chose; ici ‘être’ est une copule: ‘Vénus » = ‘étoile du matin’: cela permet de mieux comprendre ce que signifie l’idée de ‘femme-objet’ ou d’homme-objet: j’ai une femme, un mari, des enfants, etc. « Je suis moi » est du même ordre: « je=je », une tautologie où je m’égalise avec moi-même ! Je suis moi taulogie ne dit rien de moi hormis cette déclaration tautologique toujours vrai et que rien ne peut donc venir contredire.
    Mais si je dis « Vénus EST une planète », alors ‘Vénus’ vérifie, tombe sous le concept ‘être une planète’. ‘Être’ n’est plus une simple copule, il désigne une appartenance, une propriété: l’objet ‘Vénus’ vérifie le concept ‘être une planète’. Concept et fonction sont similaire pour Frege: ainsi ‘Vénus’ est une image de la fonction ‘être une planète’. On en vient donc à distinguer la fonction-concept de son parcours de valeurs et des objets qui les vérifient.
    L’homme et la femme (petit ‘h’ et petit ‘f’) sont des Hommes (grand ‘H’), sont des mammifères, etc.
    On voit donc que ta proposition « Le verbe « être » est le plus puissant quand il est seul » pose problème puisqu’il y a deux êtres très différents.
    À travers ces deux êtres nous retrouvons une caractéristique spécifique du langage humain: la polysémie, le fait qu’un même mot, qu’un même signifiant (qu’une même sonorité) puisse porter des sens différents.

    « « Je t’aime » est d’une puissance qui s’auto-suffit »: Rolland Barthes (« Fragments d’un discours amoureux ») dit que le « je t’aime » est une simple profération (une simple ‘jaculation’ dirait Peirce et les théologiens !) dont la validité est restreinte au seul instant de son énonciation (rien ne dit que dans deux secondes je t’aimerai encore !).

    « A la question « Tu es qui ? » »: un philosophe grec dont le nom m’échappe préférait demander aux gens qu’il croisait « d’où viens tu ? ». Cette question me semble une réponse au « qui es tu ». « D’où viens tu ?» est une question éco-logique, là où « qui es tu ?» est une question ego-logique ! En effet, dire « je suis moi » est une tautologie qui revient à dire « je=je » c’est à dire une définition auto référentielle de soi-même. Une tautologie est toujours vrai (donc psychotique) et ne dit donc rien sur celui qui le dit. « Se prendre pour soi est une folie » proclame Daniel Widlocher (ancien chef de service de psychiatrie de La Pitié Salpétrière et ancien président de l’Association Internationale de Psychanalyse).

    « A la question « Tu es qui ? » la plupart répondent : « je suis médecin, formatrice, ingénieur, coiffeur ou chercheuse ». Tant de choses qu’ils FONT, mais pas ce qu’ils SONT »: et pourquoi ce que je fais ne participerait il pas de ce que je suis ? « L’essence de l’homme est son existence » dit Heidegger (et j’existe comme médecin, formateur, etc) et le postulat de l’existentialisme sartrien est « l’existence précède l’essence » sauf pour l’objet ‘cendrier’ qui lui est déterminé (comme tous les objets) par son essence de cendrier): autrement dit par Sartre: « on n’est pas responsable de ce que l’on EST, mais on est responsable de ce que l’on FAIT » (entre autre comme professionnel): je suis responsable de la manière dont j’exerce la médecine.
    Ainsi quand on dit « je veux être aimé pour moi et non pour mon argent ou ma profession », on feint d’ignorer que cet argent ou cette profession participent pour les autres de ce que je suis pour eux… sans que je sois pour autant réduit à cet argent ou à cette profession.
    Pour Spinoza, inventeur du sujet en tant que désirant, désirer c’est « exister en acte »: mes actes sont bien mes manières d’être, ce que je suis en acte. Mais il est simultanément évident que je suis le point commun invariant de toutes ces images: je suis donc deux fois, une première à travers différentes images de moi et une deuxième comme ce point commun invisible à toutes ces images visibles: « je suis (être comme substantif en image) où ça ne pense pas et ça pense (être comme verbe impersonnel) où je ne suis pas (en image)». Hamlet avait tort, ce n’est pas « être OU ne pas être » qui est la question mais « être ET ne pas être ». Comme Homme, je ne suis pas homme ou femme: homme et femme sont deux images de l’Homme; et cet Homme peut s’imager en homme ou en femme mais n’est ni l’un ni l’autre. « L’inconscient ne connait pas la différence des sexes ».

    « D’où viens tu? » est au plus proche de l’étymologie de « exister » par Heidegger: ek-sistere soit être posé (sistere) à partir de l’extérieur (ex): je n’existe que de manière concomitante avec les éléments auxquels je suis connecté, c’est donc une conception dynamique d’un « ’je’ suis » qui justement n’est pas réduit à son seul « je ». C’est une conception qui m’assimile à un carrefour qui se définit par l’ensemble des routes qui y arrivent et en partent sans réduire ce carrefour à sa seule image statique et egotique.
    J’existe avant tout par le carrefour de ma langue, qui pré existe à ma naissance et persiste après ma mort, et me relie aux autres.

    « Etre » sans justification aucune est doté de cette même puissance, car tous les emballages sont retirés. Ne reste plus que l’essence ».
    : là tu ouvres tout un pan de la philosophie… car pour certains l’essence est un emballage théorique ! On pose comme postulat que les essences (d’homme ou de femme, par exemple) existent: or un postulat n’est pas une preuve !
    « L’essentialisme est un courant philosophique qui considère que toute entité peut être caractérisée par un ensemble d’attributs essentiels nécessaires à son identité et à sa fonction ». Ainsi on va considérer que l’homme et la femme sont par essence différents, un peu comme pour les grecs anciens, les dieux nous donnaient une place dans le cosmos: maître ou esclave, par essence ! De ce fait, la ségrégation entre maître et esclave n’était pas un problème, car ça n’était pas un fait social sur lequel on puisse agir… porte ouverte sur toutes les ségrégations… C’est la principale critique envers l’essentialisme: je peux créer autant d’essence nécessaire à la conclusion où je veux en arriver.
    Nominalisme et constructivisme fut la réponse contre l’essentialisme: « on ne nait pas femme (récuse l’essentialisme), on le devient (c’est une construction sociale genrée)»: Simone de Beauvoir.

    Enfin, il y a ceux qui ont pointé le refus et le déni du déterminisme en nous (Spinoza, Hume, Nietzsche… repris par Freud); et que résumerait cette phrase de Lacan: « je suis où ça ne pense pas (la boursouflure de l’ego, cet esclave !), et ça pense où je ne suis pas (le ça inconscient déterminé par la biologie pulsionnelle et les traditions)». « L’inconscient ne connait pas la différence des sexes », idée même du refus freudien d’un essentialisme sexuel, mâtiné d’un universalisme kantien. Il y a du masculin et du féminin (et c’est moi qui le nomme, lui confère des attributs et les théorise) que l’on soit homme ou femme.

    « A la question « Tu es qui ? » la plupart répondent : « je suis médecin, formatrice, ingénieur, coiffeur ou chercheuse ». Tant de choses qu’ils FONT, mais pas ce qu’ils SONT »: le verbe être est un verbe d’état or il est évident que je ne suis pas médecin ou intelligent à temps plein: le verbe être comme verbe d’état présente le risque de nous faire faussement croire à la permanence d’une qualité, ou de nous enfermer dans une caractéristique: « il EST de gauche ou de droite ». Jusqu’à voir des personnes inscrit dans un Parti de gauche mener une politique de droite et réciproquement !
    On retrouve l’idée de Barthes affirmant qu’on ne devrait parler que par métaphore, loin de toute arrogance assertive. («tout le Neutre est esquive de l’assertion… de l’affirmation»: suspension du jugement (épochè). CRITIQUE DU «C’EST» AVEC SON ARROGANCE; y compris masquée derrière une précaution oratoire)
    «l’exigence du neutre tend à suspendre la structure attributive du langage , ce rapport à l’être, implicite ou explicite, qui est, dans nos langues, immédiatement posé, dès que quelque chose est dit» Blanchot. «Parler non par adjectifs mais par métaphore, c’est ce qu’on fait les poètes»: l’adjectif, le verbe, le prédicat capture le sujet. Ce que montre très bien l’anglais en mettant en premier l’adjectif qui capte le substantif qui ne fait que l’illustrer: ex: offline video qui met en avant le ‘offline’ ou the red car.
    Quasi terrorisme fascisant du verbe être: « tu es ma femme, mon mari »: certes paroles instituantes qui reconnaissent un statut à l’autre, mais paroles prédatrices par l’appropriation d’un ‘ma’ ou ‘mon’.
    Angelus Silesus: «Si tu aimes quelque chose, tu n’aimes rien./ Dieu n’est ni ceci ni cela. Laisse le quelque chose» (fonction vs parcours de valeurs)(Narcisse: l’image des adjectifs). Cela récuse le substantif « être » et promeut le verbe être impersonnel. Retour du problème de grammaire, le substantif pervertissant le verbe via une réduction métonymique iconophile.

    « On croit suivre la nature (ses essences), encore et encore, et on ne fait que suivre les formes à travers lesquelles nous l’observons (constructivisme et nominalisme)» Wittgenstein.

    Et enfin pour relancer la réflexion:
    « Nombreux sont ceux qui vivent en nous ;
Si je pense, si je ressens, j’ignore
Qui est celui qui pense, qui ressent.
Je suis seulement le lieu
Où l’on pense, où l’on ressent.. » Pessoa
    « Je suis un évadé, dès que je suis née, en moi l’on m’a enfermé. Oui mais je me suis enfui. Être UN c’est une prison, être moi c’est ne pas être, je vivrais dans la fuite mais pour de bon » Pessoa
    «Vivre c’est être un autre et sentir n’est pas possible si l’on sent aujourd’hui comme on a senti hier. Sentir aujourd’hui comme on a senti hier, ça n’est pas sentir, c’est se souvenir aujourd’hui de ce qu’on a ressenti hier, c’est être aujourd’hui le vivant cadavre de ce que fut hier la vie. Tout effacer sur le tableau, du jour au lendemain se retrouver neuf à chaque aurore dans la revirginité perpétuelle de l’émotion. Voilà et voilà seulement ce qui vaut la peine d’être ou d’avoir pour être ou avoir ce qu’imparfaitement nous sommes… Ce qui sera demain sera autre et ce que je verrais sera vu par des yeux recomposés, emplis d’une vision nouvelle… Vous n’êtes aujourd’hui, vous n’êtes moi que parce que je vous vois. Vous serez demain ce que je serais et je vous aime voyageurs penchés sur le bastingage comme un navire en mer croise un autre navire laissant sur son passage des regrets inconnus» Pessoa
    « Le propre d’une culture c’est de ne pas être identique à elle-même » (Derrida)
    «Je pense donc je ne suis pas et je suis d’autant moins que je pense davantage» : Fernando Pessoa
    « Tantôt je pense, tantôt je suis » Paul Valéry

    « Tout problème de philosophie est un problème de grammaire »: être est ET un verbe ET un substantif.

    Cet ‘être’ ainsi définit est un être éminemment variable puisqu’on en donne trois images. Mais de ces trois images j’en tire un point commun, un invariant commun à ces trois images: l’Homme avec un grand H qui indique l’espèce humaine comme concept abstrait que dénotent néanmoins ces trois images concrètes. Cela a le mérite de pointer que l’être est ici l’idée d’un devenir dans le temps, une permanence dans le changement (« seul le changement est permanent » Héraclite). L’être serait alors notre capacité humaine à saisir les choses dans le devenir du temps, « ce qui persiste quand tout change ».
    On rejoint Angelus Silesisus: « Je suis celui qui est » (Dieu). Angelus Silesus: «Si tu aimes quelque chose, tu n’aimes rien./ Dieu n’est ni ceci ni cela. Laisse le quelque chose» (fonction vs parcours de valeurs)(Narcisse: l’image des adjectifs).

    Cette bulle met la barre très haute puisqu’elle touche au fondement même de la philosophe: être.
    Certains philosophes, tels que Nietzsche et Heidegger, ont affirmé que la division ontologique fondamentale de l’Occident est celle qui place d’un côté un Être immuable (Parménide) et hors du temps, et d’un autre côté un être changeant (Héraclite: seul le changement est permanent). Ainsi, dans la Métaphysique occidentale, c’est l’idée que les hommes se sont faite du temps qui serait à l’origine de la division des régions de l’être et de leur hiérarchisation.

    Depuis le début s’oppose donc la permanence de l’être chez Parménide à l’être comme devenir chez Héraclite (seul le changement est permanent: l’eau du fleuve ne repasse jamais au même endroit même si c’est le même fleuve).
    Rebondir sur cette bulle reviendrait donc à résumer l’histoire de la philosophie… chose dont je suis incapable !

    Mais essayons quand même quelques rebonds imagés.
    Au lieu d’écrire principalement des livres de philosophie le Grecs anciens écrivaient des mythes et des légendes. Ainsi la légende d’Oedipe et la fameuse énigme que lui pose la Sphinx: « quel EST cet ÊTRE qui marche à quatre pattes le matin, à deux pattes le midi et à trois pattes le soir (le veillard avec sa canne) »: réponse c’EST l’Homme (grand H): Oedipe a su se défaire, se déprendre des trois images d’une même chose (Das Ding) pour en extraire la « substantifique moelle » invariante de l’Homme. Même si l’eau du temps coule de façon irréversible de l’enfance à la vieillesse, il y a le concept d’Homme qui rend permanent ce qui pourtant ne cesse de changer d’image. Il faut donc pouvoir se méfier et se déprendre des images (enfant, adulte, vieillard) pour en retenir un point commun invariant: l’Homme. Il faut être iconoclaste à l’inverse de Narcisse englué dans la réduction de son être à sa seule image visuelle.
    La résolution de cette énigme par Oedipe est peut être ce qui permet de saisir au mieux la pensée d’Heidegger dans « être et temps »: la saisie du temps est ce qui est spécifique de l’humain et constitutif de son être. « le concept est le temps de la chose » (Hegel repris par Lacan), le concept d’Homme est le temps de l’Homme débarrassé de ses scories chronométriques: il y a quelque chose, l’Homme, qui persiste quand le temps chronométrique change.
    Je peux être jeune, être adulte, être vieux: mais ce ne SONT que des images. Et ce que je SUIS dépasse ces simples images visuelles. Il y a donc de l’être qui n’est ni jeune, ni adulte, ni vieux (ce que tu appelles « retirer les emballages » !); un être éternel (car indépendant du temps chronométrique qui passe et sert d’emballage) à défaut d’être immortel !
    « Tant de choses qu’ils FONT, mais pas ce qu’ils SONT »: et pourtant ils SONT jeune, adulte ou vieux, et le verbe être en rend compte… et bien qu’ils soient ceci ou cela, on ne peut les réduire ni à ce qu’ils FONT ni à ce qu’ils SONT. Mais si l’on revient à la philosophie de l’énigme, ils sont l’invariant commun Et à ce qu’ils sont Et à ce qu’ils font.
    On retrouve le piège grammatical de la double détermination grammaticale de l’être comme verbe IMPERSONNEL et comme SUBSTANTIF (je suis médecin et vieux, par exemple: ‘être’ comme copule).

    Prenons deux énoncés différents de ce qui a priori aurait pu être la même chose: « je suis intelligent » ou « j’ai de l’intelligence ». « je suis intelligent », avec le verbe être comme verbe d’état, donne à penser que je suis intelligent à temps plein, en CDI, sans interruption. Or pourtant il est évident que parfois je suis aussi très con ! Auquel cas, « j’ai de l’intelligence » sonne plus juste car introduit cette idée que cette intelligence que j’ai comme un outil, parfois je m’en sers et parfois j’oublie ou j’échoue à m’en servir.

    « Je t’aime » est d’une puissance qui s’auto-suffit. Il ne peut être qu’amoindri quand nous lui ajoutons quelque chose comme « beaucoup ». Est-ce « je t’aime » ou « j’aime » qui est auto-suffisant ?! Car après tout j’aime la conception et le ressenti que JE me fais de TOI, à tel point que toi c’est moi, c’est toi vu par moi… « mirage d’un altruisme narcissique » (Lacan, bien sûr !).

    PAR MES IMAGES JE CONSISTE ET PAR L’INVARIANT COMMUN À TOUTES CES IMAGES J’INSISTE: J’INSISTE LÀ OÙ JE NE CONSISTE PAS ET JE CONSISTE LÀ OÙ JE N’INSISTE PAS.
    On a souvent résumé, pour ne pas dire réduit, Descartes au fameux « je pense donc je suis », sans remarquer qu’ailleurs il écrit « je pense, j’existe »: j’existe de penser et quelque soit le contenu de mes pensées. « Penser c’est lier », c’est cette activité de liaison qui me fait être: un être dynamique (comme la résolution de l’énigme l’illustre). C’est ce que disait déjà la légende d’Oedipe citée plus haut: je suis, d’être capable de lier, de relier les différentes images de l’Homme que cet être à quatre pattes, à deux pattes et à trois pattes présentifient. Il y a un être atemporel, éternel capable de réunir le divers temporel dans une unité atemporelle, un Homme à la congruence de toutes ses images: « Unitas in varietate » et « congrum in multiplex »

    « Carpe diem »« Carpe diem quam minumum credula postero »
    (cueille le jour et sois un minimum préoccupé par le jour qui suit)
    « Tu dois devenir l’homme que tu es. Fais ce que toi seul peux faire. Deviens sans cesse celui que tu es, sois le maître et le sculpteur de toi-même. » Le stoïcisme de Nietzsche.
    * «deviens ce que tu es» (Pindare) : être est statique (identique à soi-même : certitude) et la vie c’est d’être en devenir (non identique à soi-même : incertitude) ≡ Baroque : «mouvement en train de se faire» Deleuze.
    * l’unité de l’être, son ‘je suis moi’ est une haine du devenir et de la vie, un fantasme qui est nécessairement auto au sens platonicien : dans mon devenir ce que je suis maintenant sera un autre demain (sinon je serais un invariant sans aucun devenir, mort d’être identique à soi-même)

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